Écriture inclusive : entre inclusion et entre-soi

Le débat sur l’écriture inclusive divise et crée de nombreuses dissensions. Loin des positionnements idéologiques et politiques, on peut se questionner sur les conséquences de l’arrivée de nouvelles graphies dans l’orthographe française.

D’abord langue romane puis français moyen puis français classique, la langue française a une histoire longue et complexe. Entre influences celtes, germaniques, latines, grecques, arabes, le français a connu de nombreuses mutations.

Contrairement aux idées reçues, la langue française a d’abord été une langue orale parlée par des gens populaires. Plus tard, naîtra le français classique repris par les grands savants de la Renaissance, institué par l’Académie Française et imposé petit à petit à toute la population du XVIe siècle à nos jours.

La langue française a une orthographe difficile à maîtriser. La dictée de Bernard Pivot en était la preuve. Même ceux issus des cursus universitaires montraient souvent leur limite face à cet orthographe insaisissable. Saviez-vous qu’on écrit des yeux marron sans mettre de « s » à marron? Nombreux sont ceux qui font l’erreur.

« aurez »
« Or », « est »

Les fautes d’orthographe sont fréquentes. En réalité, très peu de gens maîtrisent réellement le français académique dont les règles comprennent de nombreuses exceptions… à la règle.

C’est dans ce sens qu’en 1990, il y a une réforme de l’orthographe qui tendait à simplifier l’écriture. Très décriée, c’est en 2008 qu’elle commencera à être appliquée dans quelques classes françaises. Mais en réalité, le phénomène reste anecdotique.

Récemment, une nouvelle typographie fait sont apparition pour être plus inclusive des différentes identités de genre. Ainsi à la fin des mots, on peut trouver des .e, .æ, .x, .s, .es. Cela concerne aussi les pronoms iel, celleux etc…Au delà des levées de bouclier basées sur la sacralisation de l’orthographe française, il peut être intéressant de se poser la question des conséquences d’une telle modification de l’orthographe.

Il est indéniable que ces nouvelles écritures prennent en compte les identités de genre et permettent de marquer la singularité de chacun. Cependant, il faut admettre qu’elles ne permettent pas une meilleure intégration des personnes dyslexiques et surtout les dyslexiques dysorthographiques pour qui ces graphies compliqueront leur rapport à l’écrit. Et cette critique est loin d’être anecdotique quand on sait que 5% des élèves sont dyslexiques.

D’une manière générale, il est très difficile d’amorcer un changement de l’orthographe française. Mais si la réforme de 1990 (déjà peu appliquée) tendait à simplifier les graphies, l’écriture inclusive représente un vrai défi orthographique pour les personnes ayant un rapport à l’écriture et à la lecture difficile. Le défi est de pouvoir élaborer une écriture prenant en compte les identités de genre et les difficultés orthographiques réelles des personnes ayant des troubles « dys ».

Une réflexion sur “Écriture inclusive : entre inclusion et entre-soi

  1. Elaine Viennot, historienne de la littérature et critique démontre bien comment les règles de la langue française — en particulier la règle « le masculin l’emporte sur le féminin » — ont été imposées au terme de vifs et longs débats témoignant davantage, d’un rapport de force défavorable aux femmes que d’une démarche linguistique scientifique. Elle rappelle que les noms de métier et de fonction féminisés qui existaient au Moyen Âge et au début de la Renaissance ont peu à peu été proscrits à partir du xviie siècle. Elle propose donc une « démasculinisation » de la langue. D’où l’invention du point médian et des pronoms neutres. Il s’agit juste d’un rééquilibrages en faveur des femmes, trop longtemps invisibilisées dans cette langue. Après, comme toute invention, elle reste perfectible.

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